En faisant le premier pas [CLOS]

Une fine brume se délitait peu à peu alors qu'à l'horizon, le soleil se levait. Mais le ciel bas et cotonneux dissimulait l'astre solaire, et l'air était froid et piquant. Le sol était boueux à cause de la neige qui avait fondue. Il était encore tôt, très tôt, et les fenêtres s'ouvraient à peine sur les habitants de la réserve. Koralyne était assise, sur un banc, et tous ses sens de louve était en action. Elle avait passé la nuit dans sa chambre d'hôtel, la fenêtre ouverte, à regarder les quelques flocons de neige tomber. Elle n'osait pas sortir lorsqu'elle était en louve, de peur de croiser un autre loup, et comme elle n'avait pas encore eu l'occasion de rencontrer un membre de la meute du coin, elle craignait de représenter à leurs yeux une quelconque menace. Or, elle avait desesperement besoin d'eux. Elle avait besoin de quelqu'un comme elle. Elle se sentait plus seule que jamais, sans sa meute.

Le souvenir de sa meute la fit trembler, alors que la température de son corps devait avoisiner les 42°. Une boule se forma dans sa gorge, et elle se sentit déchirer entre la peur et cette horrible douleur qui lui tordait les entrailles et menaçait de la faire sombrer à tout moment dans la folie. Cinq semaines s'étaient écoulées, et les images de cet horrible combat entre vampires et loups revenaient sans cesse dans son esprit. Elle n'avait pas parlé à sa mère depuis deux semaines, mais son père lui avait viré une importante somme d'argent, à la demande de Koralyne. Dans la mesure où il lui était désormais impossible de retourner vivre chez elle, elle devait à présent trouver un emploi, mais pour l'instant, elle vivait encore à l'hôtel, et n'était sortie que pour s'acheter à manger, et déambuler au hasard dans la réserve.
C'est comme cela qu'elle avait pu en apprendre un peu plus sur la meute. Elle ne savait pas exactement combien ils étaient, mais elle était pratiquement sûre qu'ils l'avaient déjà repérés. Son odeur de louve devait être très forte, et, Koralyne en était presque sûre, elle avait croisé une vieille personne qui avait automatiquement reconnue en elle une louve. Cependant, Koralyne avait fui, préférant rester dans l'ombre.

Mais désormais, il lui fallait à tout prix entrer en contact avec la meute. La douleur de la solitude allait finir par la rendre folle. Elle ne savait pas ce qu'il y avait de pire : sous sa forme humaine, sa douleur était davantage présente que sous sa forme de louve, mais sous sa forme lupine, le silence qui se faisait dans sa tête, puisque toute sa meute avait été décimée, menaçait de la rendre folle. Il lui fallait quelqu'un, n'importe qui.
Et c'est comme ça qu'elle s'était retrouvée devant ce banc. Il y a deux jours, alors qu'elle allait entrer dans l'épicerie principale de la réserve, une odeur l'avait assaillie. Jusqu'à présent, la réserve regorgeait d'odeur de loups. Mais là, elle était plus forte que n'importe où ailleurs. Elle avait même pu deviner qu'il s'agissait d'une louve, comme elle. Craignant pour sa vie, Koralyne avait fui, mais maintenant, la solitude lui pesait trop, et elle était décidée.

Elle fixa son regard sur la devanture de la boutique, à l'autre bout de la rue. Elle s'était placée le plus loin possible, mais elle savait qu'à l'instant précis où la louve ouvrirait la boutique, elle la sentirait. Elle tendit l'oreille, faisait au mieux abstraction des bruits environnants, mais elle ne parvint pas à entendre le battement du coeur, un battement ultra rapide propre au loup. En revanche, si elle se focalisait sur l'odeur qu'elle avait déjà sentie, elle pouvait presque visualiser où se trouvait la louve. Elle se crispa sur le banc, souhaitant de tout son coeur que la meute d'ici l'accepte, ou au mieux, la tolère. Elle ne savait pas si elle serait capable d'entrer en contact avec une autre meute, mais être avec d'autres loups serait toujours mieux que de se retrouver seule avec sa douleur. Et puis, il fallait qu'elle parle à quelqu'un..
Elle se recroquevilla sur elle-même. L'image de Pehaul s'imposa dans son esprit, et elle s'autorisa un moment de désespoir. Les larmes coulèrent librement sur son visage, et elle se mordit la langue pour ne pas crier sa douleur. Alors que le sang envahissait sa bouche, sa langue cicatrisait déjà, et elle déglutit, ravalant sa tristesse, essuyant ses larmes, et se forçant à se contrôler. Son regard azur revint se poser sur la boutique, alors qu'une légère brise soulevait les mèches de ses cheveux. Un groupe d'enfants passa devant elle en chahutant, et alors, la grille de la boutique se souleva, la porte s'ouvrit et le panneau "Ouvert" fut affiché..

Le soleil était bien loin de se lever lorsque Sora fut réveillée par du mouvement dans une pièce annexe. Se glissant hors de ses couvertures malgré la fraicheur de l'air, l'esprit encore embrumé, elle se traîna dans le couloir jusqu'à la salle de bain où elle trouva sa tante, farfouillant dans l'armoire à pharmacie. Aquene avait attrapé une bonne grippe depuis deux jours mais refusait de rester dans son lit toute la journée. Avec un soupir, ignorant les protestations de la malade, Sora reconduisit sa tante dans sa chambre et lui colla un thermomètre dans la bouche. 39,4°C. Si pour elle c'était carrément une hypothermie, pour une simple humaine comme Aquene c'était mauvais. Les cheveux en tout sens, Sora s'agita à travers leur maison afin d'amener les médicaments et un repas léger à la vieille femme. Celle-ci en avait à peine avalé la moitié qu'elle retombait dans un profond sommeil.

Tout en se préparant pour la journée, Sora réfléchit rapidement. Elle ne pouvait laisser sa tante dans cet état et la boutique devait être ouverte. Elle ferait savoir au premier membre de la meute qui passerait qu'elle resterait indisponible pour quelque temps. Et il fallait absolument qu'elle pense à appeler le médecin. Elle remonta ses cheveux en un chignon lâche et enfila un débardeur, un pull épais et une jean. Elle descendit dans l'épicerie, où elle se prépara à ouvrir tout en démarrant la bouilloire qui l'y attendait. Elle remonta pour préparer son petit-déjeuner et jeter un coup d'oeil sur Aquene. Puis, elle redescendit, dégringolant les escaliers avec une légèreté et une vitesse qui lui était propre.

Neuf heures du matin sonnèrent à la vieille horloge et, un toast entre les dents, Sora décadenassa la grille métallique et la fit remonter avant de déverrouiller la porte et de retourner le panneau. Leur fournisseur avait déposé les produits frais du jour dans des cageots devant leur devanture, sous le auvent qui les protégeait des intempéries, comme chaque matin. Sora sortit pour les rentrer mais fut rapidement distraite par une odeur forte, connue, et pourtant étrangère. Elle tourna automatiquement la tête, son regard traversant la rue jusqu'au banc d'en face. Une jeune femme s'y trouvait assise en une parfaite imitation d'une statue de glace. Sora la fixa, impassible. C'était donc elle qui tournait autour de la réserve depuis quelques temps ? Qu'est-ce qu'elle pouvait bien faire là, à la fixer, par ce temps ? Haussant intérieurement les épaules, elle se baissa pour récupérer un cageot de légumes. Entre ses dents, son toast oscillait au fur et à mesure qu'elle le grignotait. Elle jeta un nouveau coup d'oeil par dessus son épaule. La jeunotte n'avait pas bougé. D'un coup, son toast disparut dans sa bouche, avalée en un instant, et elle la héla par delà la rue :

« Qu'est-ce que tu attends ? Le dégel ? »

Typiquement Sora : nullement agressive, mais sans tact aucun. D'un mouvement de tête, elle lui fit quand même signe de rentrer, au cas où cela n'aurait pas été assez clair. Elle déposa le cageot de poireaux, de carottes et de pommes de terre sur le rayon des fruits et légumes qu'elle avait nettoyé la veille au soir. Elle fit ensuite un crocher derrière le comptoir, où la bouilloire sifflait avec la fierté du devoir accompli. Elle la débrancha et sortit deux tasses propres, rapidement suivies des paquets de sucre, de thé et de café que les Kimama gardaient en stock pour les longues journées et matinées difficiles. Remplissant à ras-bord sa propre tasse, elle y glissa deux morceaux de sucre et un sachet de thé avant de la recouvrir pour laisser infuser.

« Thé ? Café ? » demanda-t-elle en sentant la louve approcher. « Tu ferais mieux de t'éloigner de la porte... » prévint-elle brusquement. Un instant plus tard, l'odeur qu'elle avait détecté et qui appartenait à un bout de chou d'à peine huit ans débarqua en trombe dans l'épicerie.
« Bonjouuuuuuuur Sora ! » s'exclama l'enfant sans prêter attention à l'autre personne présente.
« Hey Mika. Qu'est-ce que tu prends ce matin ? »
« Des fraises !!! »
« C'est plus la saison des fraises trésor. Où tu veux qu'elles poussent les fraises, avec tout cette neige ? » répondit-elle patiemment. « Prend donc une pomme dehors. »
« D'accord ! A demain ! »
Et l'enfant repartit en trombe aussi vite qu'il était venu, prenant ses jambes à son coup pour être à l'heure en cours, comme chaque matin. Et comme à chaque fois, sa mère passerait le soir même pour faire ses courses et payerait en même temps le goûter de son fils.

« Alors, quel est ton nom ? » demanda Sora en redirigeant son attention sur la nouvelle venue. Elle fit glisser une tasse remplie d'eau chaude vers la jeune femme, lui laissant le soin de se servir parmi les différents choix disposés sous son nez.

Sa vue acérée de louve lui permettant de mieux détailler la jeune femme qui se trouvait à l'autre bout de la rue, Koralyne se tendit instinctivement lorsque celle-ci se rendit automatiquement compte de sa présence, comme elle s'y était attendue. Partagée entre le désir de ne plus être seule, et la méfiance et l'agressivité propre aux loups qui se retrouvaient face à d'autres loups étrangers, elle ne bougea pas d'un centimètre. Seul son coeur battant à un rythme effréné aurait pu certifier qu'elle ne s'était pas transformée en statut, ça, et la buée qu'elle faisait en respirant.

A quelques mètres de là, la jeune femme la fixait, imperturbable, semblant la jauger du regard, s'assurant peut-être qu'elle ne représentait pas une menace immédiate. Mais, Koralyne en était sûre, au moindre problème, elle saurait réagir avec la rapidité et l'agilité propre à un loup. Alors l'indienne s'adressa à Koralyne, et l'adolescente ne sut tout dabord pas comment réagir. Mais un léger signe de tête, qui serait passé inaperçue pour un humain, mais qu'elle vit nettement, lui signifia qu'elle pouvait entrer dans la boutique.
Se forçant à avancer lentement, Koralyne se dirigea donc vers l'entrée de l'épicerie, et alors qu'elle hésitait sur le pas de la porte, tous ses sens en éveil, la jeune femme lui intima de s'écarter de la porte. Alors que Koralyne s'exécutait, une véritable boule d'énergie, un petit garçon, bondit à l'intérieur de l'épicerie, et repartit quelques secondes plus tard. Koralyne se retrouva alors seule avec l'autre louve.

Lorsqu'elle était avec son ancienne meute, Koralyne leur avait un jour demandé s'ils avaient déjà eu l'occasion de rencontrer les loups d'une autre meute. Ce n'était pas le cas, mais ils l'avaient rassurés en lui certifiant que si un jour cela devait arriver, les choses ne pouvaient que bien se passer, dans la mesure où aucune des deux meutes ne chercherait à imposer sa présence et sa volonté à l'autre. Aussi, Koralyne se demanda comment sa présence avait été perçue par la meute des environs. Comme elle avait fait en sorte de se faire discrète, et de ne pas causer d'ennui, elle espérait qu'elle ne représentait pas une quelconque menace.
Une tasse reposait devant elle, pleine d'eau chaude. Koralyne choisit du thé à la vanille, parce que c'était le préféré d'une de ses soeurs.. Chassant rapidement de mauvaises pensées de son esprit, elle s'éclaircit la gorge.

" Je m'appelle Koralyne. " répondit-elle tout dabord, alors que son thé infusait tout doucement. " Je viens d'Angleterre. Je suis.. enfin, je faisais partie de la meute des Mawokee. Je suis.. Je suis désolée de ne pas être venue me présenter dès mon arrivée. Je ne connais pas bien les règles, je.. je suis jeune. Enfin, ça ne fait pas longtemps.. "

Elle s'interrompit pour boire une gorgée de son thé, et reprit, de sa voix douce :

" Je ne sais même pas si j'ai le droit de rester ici.. "

Les doigts crispés autour de sa tasse, elle se demanda si elle devait raconter toute son histoire ou attendre de rencontrer l'alpha. Peut-être qu'ils avaient eu vent de ce qui s'était passé, après tout. Les lèvres tremblantes, elle fronça les sourcils, ressentant brusquement une forte colère en sentant qu'elle perdait le contrôle sur sa douleur qu'elle muselait pourtant depuis un bon moment. Agaçée, elle se maudit intérieurement.

Maintenant que Sora prenait le temps de l'observer, Koralyne (puisque c'était son nom) n'avait pas bonne mine pour une louve. Ses épaules abaissées, son regard fuyant et ses vêtements froissés n'étaient pas bon signe. Et le fait qu'elle ait fait tout ce chemin depuis l'Angleterre, c'était tout simplement... impressionnant (surtout pour quelqu'un qui, comme Sora, n'avait jamais quitté son pays voir même sa région natale). Quoi que Sora ait imaginé pour expliquer la présence d'une louve étrangère sur leur territoire, elle pouvait toujours laisser tomber les suppositions bénignes du genre "elle a simplement un message à transmettre à l'Alpha". A première vue, il valait mieux pêcher dans les situations beaucoup moins réjouissantes, pas qu'elle soit sûre de vouloir en savoir plis. Et elle-même pouvait comprendre qu'il vaudrait mieux qu'elle évite d'y aller avec ses gros sabots de fille qui met les pieds dans le plat, c'est pour dire...

« Je suis pas sûre qu'il y ait des règles quelconques sur le sujet. Mais se présenter est déjà un bon début. » remarqua Sora dans le but que la demoiselle arrête de s'inquiéter de préoccupations aussi futiles. Sora, le protocole et les règles, ça faisait trois. Pour ça, Koralyne était probablement tombée sur la bonne personne pour un premier contact. Elle porta jusqu'à sa lèvre sa tasse de thé et observa du coin de l'oeil les mains agitées et tremblantes de son interlocutrice. Tout le langage corporel de Koralyne criait pour elle sa peur, son inquiétude, et son trouble. Pour un loup, elle dégageait des signaux tellement évidents que sous forme animale elle en serait effrayante.

« Et pour info, je ne mords pas : pas sous cette forme en tout cas, ça fait trop mal aux dents. » Difficile, comme toujours, de savoir si elle plaisantait ou si sa remarque était tout à fait sérieuse. Cependant, la remarque était clairement destinée à l'apaiser un peu (avec sa logique toute personnelle). C'est qu'elle lui ferait presque peur : Sora n'était pas experte dans les problèmes sentimentaux et émotionnels alors gérer une jeune louve dans cet état, ça avait de quoi l'inquiéter un peu. Il fallait espérer qu'Enzo serait disponible pour jouer le grand frère attentif, c'était plus son rayon.

Sora émit un son de désapprobation lorsque Koralyne émit l'idée qu'elle n'avait pas le droit de rester. Si seulement il venait une telle idée aux vampires, franchement, ça règlerait bien des problèmes, mais de la part d'une louve, qu'elle soit ou non de la meute, penser qu'elle n'avait pas le droit d'être là c'était un peu fort. L'arrivée de quelques membres de la tribu Quileute parmi eux était bien la preuve que ce genre de considérations étaient bien dépassées. Cette demoiselle avait vraiment l'esprit bouleversé pour penser ainsi. D'ailleurs, Sora discerna quelques signes de colère intempestive, qu'ils lui firent froncer les sourcils. Il s'agissait pas qu'elle lui fasse le coup de perdre le contrôle dans un endroit public en plus. « Tant que tu ne te transformes pas au beau milieu de l'épicerie, tu as le droit d'y rester comme tout un chacun. Maintenant respire à fond et finis ton thé, personne ne va te sauter à la gorge, personne ne va te mettre dehors. Tu es en territoire ami ici. »

Déposant sa tasse à moitié vide sur le comptoir, Sora sortit pour laisser à Koralyne le temps de se reprendre. Jetant un coup d'oeil de gauche et de droite, elle vérifia que personne ne lui prêtait attention. Puis, elle empila tous les cageots les uns par dessus les autres, et les hissa à bout de bras sans effort. Seulement gênée par le fait d'avoir son champ de vision obstrué, mais connaissant le chemin par coeur, elle retourna à l'intérieur et les déposa dans un coin. Elle se mit ensuite à les ranger un par un avant de reprendre :

« Je suis Sora Kimama. L'alpha, Enzo Greenwood, est mon petit-ami. Je l'appellerais dès que j'aurais finis ça. »

[Hors rp : le texte entre *...* désigne les pensées de Koralyne. ]

Koralyne put constater qu'elle n'avait pas affaire à une mauvaise personne. Soulagée de ne pas avoir commis de faux pas, elle hocha la tête en laissant échapper un léger soupir, tout en se disant qu'elle était vraiment stupide de se faire du soucis pour une question aussi futile que "est ce que je dois rester ou pas?" après ce dont elle avait été témoin. Mais dans son état psychologique, il lui était difficile de réfléchir avec calme et logique. De la même façon, il lui était difficile d'user de ses sens de loup pour en apprendre davantage sur la jeune femme qui se tenait debout devant elle. Elle n'arrivait pas à se concentrer sur ce qu'elle voyait, sur ce qu'elle sentait, sur ce qu'elle entendait. Elle était redevenue une simple humaine, traumatisée par ce qu'elle avait vécue.
Elle dut se faire violence pour ne pas se laisser aller à sa forme de louve, au moins pour échapper à sa douleur intérieure. Mais la louve en face d'elle la rassura du mieux qu'elle put, lui certifiant qu'elle ne risquait rien. Alors Koralyne se concentra sur son thé, pour ne plus avoir à réfléchir, pour ne plus penser. Le parfum de vanille l'apaisa, et elle soupira. Ses tremblements se calmèrent quelque peu, et elle put enfin détailler la jeune femme. Grande, brune, belle, dégageant ce petit quelque chose propre au loup. Pleine d'assurance. Et elle se présenta, lui précisant également qu'elle était la petite amie de l'alpha de la meute. Ce détail fut une déchirure pour Koralyne, qui replongea dans sa douleur. Elle laissa échapper un hoquet étranglé, et faillit s'étouffer en avalant son thé.

" La petite amie.. de l'alpha.. " répéta-t-elle à voix basse, et un sourire douloureux naquit sur ses lèvres, alors qu'elle replongeait tête baissée dans sa douleur. " Alors, vous n'êtes pas au courant.. je pensais que tous les loups et les vampires avaient appris ce qui s'était passé. "

Une larme solitaire coula le long de sa joue, qu'elle essuya rapidement, alors que Sora rangeait ses cageots. Koralyne l'observa, ne pouvant détourner son regard de la jeune fille.

* Cela aurait pu être ma vie. J'aurais pu ouvrir mon propre commerce, une fois mes études terminés. Je serais revenue vivre à la réserve, pour être avec Pehaul et le reste de la meute. *

" Ma meute a été entièrement décimée. " lâcha-t-elle tout à trac. "Je suis la dernière. "

Et alors, elle se mit à pleurer. Ne pouvant plus retenir ses pleurs, elle sanglota, sa douleur se répandant sur ses joues en des larmes trop longtemps retenues. Délaissant sa tasse, elle s'entoura de ses bras. Toute sa douleur, les traces que cette horrible nuit avait laissé sur son esprit, les cicatrices et les séquelles, qui doucement l'avait entraînée vers une profonde dépression, purent enfin s'exprimer, et la jeune louve, incapable de se retenir, pleura, face à cette inconnue à qui, au final, elle ressemblait, puisque Sora aussi était l'aimée d'un alpha.

En entendant un faible murmure, Sora releva la tête et fixa le visage crispée de son interlocutrice. Apparemment, elle avait dit quelque chose qu'il ne fallait pas. Elle n'était vraiment pas douée pour parler aux gens, certes, mais elle ne voyait pourtant pas ce qu'elle avait pu dire qui fasse cet effet à la jeune femme. Elle se frotta les mains pour se débarrasser de la saleté qui collait aux cageots, et fixa la jeune louve, les sourcils froncés. Elle ne voyait pas où elle voulait en venir. Être au courant de quoi ? C'est pas comme si Sora était du style à se préoccuper des rumeurs et ragots et à jouer la commère, mais en plus elle était bien loin, très loin, de se soucier de ce qui se passait en Angleterre. Et avec le problème des Volturis, elle doutait que le reste de la meute soit différent (au moins, sur ce coup là elle ne serait pas la seule à être à côté de la plaque, sauf qu'il fallait que ce soit elle qui ait droit au "premier contact").

Une meute décimée ? Elle était inédite celle-là. Et pourtant, elle pouvait difficilement douter des paroles de Koralyne : la vérité était inscrite au fer rouge sur sa personne. Profondément dérangée par la nouvelle, le premier réflexe de Sora fut de s'occuper les mains pour se donner le temps de penser. Elle était bien consciente que la jeune femme se vidait de ses larmes non loin d'elle, mais il ne fallait pas compter sur elle pour la serrer dans ses bras et la consoler : elle ne réussirait qu'à aggraver les choses. Il valait mieux la laisser se calmer les nerfs en pleurant tout son soûl, elle irait par elle-même un peu mieux après (ça fonctionnait toujours pour Sora), et elle pourrait alors appeler Enzo histoire qu'il vienne prendre les choses en main. Tout cela la dépassait largement, dans tous les domaines.

Après avoir tout rangé, Sora s'essuya distraitement les mains sur son jean et revint près de Koralyne. Elle hésita, mais même quand on était aussi peu douée socialement qu'elle, on ne pouvait pas passer sans rien dire. Elle déposa gentiment une main sur son épaule, dans l'espoir qu'elle comprenne qu'elle avait son soutien et qu'elle n'était plus seule. Elle se retint de dire des banalités du style "ça va aller", sa logique pratique refusant de sortir des bêtises pareil quand clairement ça n'allait pas, et ça n'allait pas changé d'un claquement de doigt. La jeune femme avait perdu toute sa "famille", y avait de quoi se sentir mal, c'était naturel.

« Tu es en sécurité ici. » souffla-t-elle dans un murmure, sur un ton calme et confiant. Parce que ça, c'était vrai, qu'elle avait beau être la dernière elle ne serait pas pour autant la prochaine. Le timing, avec les Volturis approchant, n'était pas idéal, mais après cela les Winnipesaukee accueilleraient sans nul doute la jeune louve comme l'une des leurs et la protègeraient comme il se doit. Enzo ne pourrait pas résister à l'histoire dramatique qui se cachait là-dessous.

Koralyne s'entourant de ses bras, tête baissée, avait de quoi attendrir le coeur de n'importe qui, et même Sora ne put y résister longtemps. Maladroitement, elle l'enlaça, glissant ses bras autour d'elle jusque dans son dos où elle la tapota gentiment, comme pour lui donner sa force. Se sentant vraiment mal à l'aise, elle se retira, ne tenant pas à s'introduire dans l'espace privé de la jeune femme qu'elle connaissait à peine.

« On t'aidera, autant que tu en as besoin. » assura-t-elle pour la rassurer, lui prouver qu'elle n'avait pas à rester seule.

Pleurer lui fit un bien fou, mais ce fut un mal pour un bien, car jusqu'à présent elle avait lutté autant que possible contre sa douleur, s'enfermant derrière un mur, se protégeant sous sa forme de louve, pour éviter de trop penser, de trop ressentir. Se laisser aller lui donna l'impression qu'elle ne pourrait pas se relever. Elle eut l'impression que tout s'écroulait, qu'elle sombrait totalement. Elle ne pouvait plus s'arrêter, elle pleurait, encore et encore, sans parvenir à stopper le débit de larmes, incapables de se rendre compte de la situation dans laquelle elle se mettait, et dans laquelle elle mettait la louve qui l'avait accueillie dans sa boutique et qui n'avait rien demandé.

En parlant de Sora, celle-ci réagit comme une vraie louve. Koralyne n'aurait su dire si toutes les femmes louves réagissaient de la même manière, mais elle savait très bien que toutes ses soeurs, si elles étaient encore en vie, auraient toutes réagies de la même façon. Avec maladresse, avec un peu de brusquerie, et avec un certain détachement qui n'aurait pas pour autant été de l'indifférence. Sora fit de même, et cela rassura un peu Koralyne, comme si elle retrouvait un peu ses marques. Ses larmes finirent par se tarir d'elle mêmes, alors que Sora lui tapotait gentiment le dos, lui faisant savoir qu'elle n'était pas seule, mais respectant son espace, ce dont Koralyne lui fut grandement reconnaissante.
Alors qu'enfin elle se calmait, sa nature de louve reprit peu à peu le dessus, et elle se sentit gênée, honteuse et agaçée, mais également soulagée. Hoquetant encore, elle se força à boire une longue gorgée de thé pour se calmer totalement, et une fois qu'elle cessa de trembler et de sangloter, elle hocha la tête, remerciant Sora pour ce qu'elle avait, ou ce qu'elle s'était abstenue de faire, volontairement ou pas.

" Je ne savais pas où aller. Ma mère avait de la famille ici, alors je suis venue. De plus, nous avions eu des échos concernant les Cullens et les Quilleutes. Alors je me suis dit que s'il existait des gens capables de comprendre, je les trouverais ici. "

Elle s'essuya le visage avec sa manche, comme le ferait une adolescente paumée, et s'humecta les lèvres.

" Il y a eu un incident.. totalement imprévu et.. un des vampires du clan qui s'était installé près de notre réserve s'est fait tué. Nous.. enfin je ne sais pas comment.. Excusez-moi, je parle encore comme si ma meute était toujours là.. l'habitude.. "

Elle eut un sourire douloureux, puis reprit :

" Mais les vampires ont cru que la meute était responsable, et.. enfin, nous n'avions aucune chance.. je crois.. je ne sais pas en fait. Je ne m'étais jamais battue contre des vampires. Mais je sais que ce n'était pas un loup qui a tué ce vampire. J'en suis sûre! " s'enflamma-t-elle, subitement en colère à l'évocation de ce quiproquo qui avait coûté la vie à toutes les personnes qu'elle aimait le plus au monde.

Un léger tremblement la secoua, et elle détourna le regard.

" Je ne sais pas ce qui a tué ce vampire. A part un loup, je ne sais pas vraiment ce qui peut tuer un vampire. Alors je me suis dit que vous sauriez, et qu'ici, je trouverais un moyen de rétablir la vérité.. "

Aussi maladroite fut-ce-t-elle, il semblerait que la présence et les paroles de Sora suffirent à rassurer quelque peu Koralyne. Un certain soulagement s'empara de la louve lorsque les larmes de son invitée se calmèrent peu à peu. La situation serait devenue bien incommode et malgré sa quarantaine d'années d'existence approchants Sora se serait retrouvée aussi mal à l'aise qu'une adolescente, ne sachant que faire de ses mains et de sa langue. Heureusement pour elle, la jeune louve qui lui faisait face n'était pas de la même veine que certaines de ses anciennes camarades de classe et un simple soutien moral semblait suffire. Tant mieux, ça, ça restait dans ses cordes. Tout cela la confortait néanmoins dans son désir d'appeler Enzo, et elle fit le tour du comptoir pour retrouver le combiné.

Elle se percha sur le tabouret du comptoir et saisit le téléphone sans fil planqué dans un coin (il n'était globalement utilisé que pour communiquer avec leurs fournisseurs et il avait tendance à prendre la poussière, mais qu'à cela ne tienne, il était quasiment flambant neuf, le précédent ayant reçu un choc fatal après une malheureuse petite perte de contrôle de Sora). Les explications que lui fournit Koralyne la prirent par surprise et elle jongla pensivement avec l'objet électronique tout en réfléchissant.

« Eh bien... je ne savais pas que de telles histoires circulaient. » marmonna-t-elle plus pour elle-même qu'autre chose. Pour tout avouer, elle n'appréciait pas vraiment l'idée que ces sujets délicatement aient si facilement circulés. De nature discrète, elle appréciait que ce genre de choses restent au cœur de la meute mais cela n'était clairement pas le cas de tout le monde. Enfin, il n'y avait pas mort d'homme après tout. Et ce n'était clairement pas à cause d'innocentes discussions de loups que les Volturis rappliquaient aujourd'hui, les vampires devaient être de bien pire commères. A force d'être immortels ils ne devaient plus avoir que ça à se mettre sous la dent.

Sora fronça distraitement les sourcils devant le récit un peu confus de la jeune femme. Elle retint quand même les grands points de cette histoire : les vampires étaient encore à l'origine de la mort des leurs, de dizaines des leurs ; mais tout cela provenait probablement de l'intervention d'un chasseur si Koralyne était sûre que les loups n'avaient pas tué ce vampire. Dans un soupir, Sora réfléchit rapidement à la situation. Elle n'allait pas déballer cette histoire d'humains chasseurs de vampires à la demoiselle alors qu'elle était dans cet état. Il y avait tant de choses à dire pour la mettre au courant, mais ce n'était pas vraiment le moment. « Tu le trouveras, » assura-t-elle calmement, la sincérité brillant dans ses yeux. « cela viendra, en temps et en heure. »

Elle saisit le numéro de téléphone portable d'Enzo - qu'elle connaissait par coeur - et attendit qu'il décroche. S'il n'était pas sous forme louve, il avait toujours son téléphone sur lui pour que la meute puisse le contacter. Au pire, elle lui laisserait un message. Elle releva les yeux sur Koralyne tandis que la sonnerie résonnait contre son oreille. « J'appelle Enzo, il pourra t'aider. » assura-t-elle calmement. Elle se tut lorsque la sonnerie s'arrêta, signalant que son petit ami avait décroché. « C'est Sora, » l'informa-t-elle bien qu'il devait avoir le numéro de l'épicerie en mémoire. « Tu peux venir à l'épicerie ? J'ai une demoiselle qui a besoin de te voir. (...) Oui, l'odeur de ces derniers jours, c'est elle. » expliqua-t-elle. Elle se redressa du tabouret, le repoussa, et attrapa sa tasse de thé qu'elle porta à ses lèvres en écoutant la réponse d'Enzo. « D'accord, je t'attend. Oh ! Tu pourrais trouver quelqu'un d'autre pour la ronde ce soir ? Aquene est malade, faut que je reste auprès d'elle. (...) D'accord, merci, à tout de suite. »

Elle raccrocha, avala une gorgée de thé refroidi, déposa le téléphone sur son piédestal, et sourit à Koralyne. « Il arrive dans cinq minutes. Il pourra t'écouter et te répondre. Ne t'inquiète pas, il est bien trop gentil pour son bien. » lui confia-t-elle, les yeux pétillants d'amusement. Elle disparut un instant, accroupie derrière le comptoir, farfouillant sur les étagères et dans les placards. Elle en sortit finalement une boîte en fer, qu'elle déposa sur le comptoir près de la tasse de Koralyne et qu'elle ouvrit, dévoilant des cookies fait maison. « Sers-toi. » l'invita-t-elle gentiment. Elle n'était peut être pas douée pour réconforter les gens, mais ses cookies avaient parait-il la capacité de faire des miracles alors... Bon, dommage qu'ils datent de deux jours, elle n'avait pas vraiment eu le temps d'en refaire depuis avec sa tante alitée. « Désolée de m'agiter partout, avec ma tante de malade je dois m'occuper de l'épicerie. » s'excusa-t-elle à nouveau en faisant le tour du comptoir pour regagner l'étal de fruits et légumes. Elle récupéra la liste des produits qu'avait ajouté le fournisseur et s'attela à tout vérifier.

En reniflant une dernière fois, Koralyne termina son thé, et poussa un soupir tremblotant. Mais ses gestes étaient à nouveau fermes, elle allait mieux, ou du moins, elle ne semblait plus sur le point de s'effondrer en larmes, pas pour les dix prochaines minutes en tout cas. Le regard baissé, elle rumina sa douleur en silence, songeant qu'elle devait paraître bien pitoyable à pleurer ainsi devant une totale inconnue. Elle rougit légèrement, gênée par les larmes qu'elle avait versé, et se reprocha de ne pas savoir mieux dissimuler sa douleur. Ne pas savoir contrôler sa colère, et donc sa transformation en louve, c'était une chose que toute la meute pouvait comprendre -ou aurait pu comprendre corrigea-t-elle en s'assombrissant davantage- mais ne pas être capable de se maîtriser comme elle l'avait fait, c'était autre chose, et elle se maudit intérieurement de s'être humiliée toute seule.
Cependant.. il fallait reconnaître que porter une telle douleur, une telle souffrance.. C'était une torture qui était devenue son quotidien. Elle n'avait pas vraiment eu l'occasion de faire son deuil, trop occupée qu'elle était à fuir l'Angleterre, et le poids des morts pesait bien lourd sur son coeur.

Sora lui signifia qu'elle appelait l'alpha, et elle hocha la tête, par pur mécanisme, sans lever les yeux. Alors que Sora était en pleine conversation téléphonique, Koralyne laissa aller ses sens de louve. Elle huma divers parfums, diverses odeurs de nourriture, et un léger parfum qui n'était pas celui de Kora, mais celui d'un autre être humain présent dans la maison. En tendant l'oreille elle put percevoir un battement de coeur qui provenait de l'étage. Le parfum devait appartenir à cette personne. Lorsque Sora eut raccrochée, elle lui expliqua que le dénommé Enzo arrivait. Koralyne leva les yeux et hocha à nouveau la tête avec un sourire grimaçant.

" Merci. " dit-elle doucement.

Sora dut avoir pitié d'elle, car elle lui offrit une boite de cookies. Koralyne fixa les biscuits un moment puis en prit un. En vérité, elle mourrait littéralement de faim, elle n'avait pas encore pris de petit déjeuner, et sa nature de louve faisait que son appétit était dévorant, quasiment à n'importe quelle heure de la journée. Cependant, elle ne mordit pas dans le cookie.

" Merci. " répéta-t-elle à nouveau. " Je vais attendre dehors. Je préfère être.. dehors. "

Et elle se leva, laissant la cookie près de la boite, pour aller s'asseoir sur le banc devant l'épicerie. Sora devait gérer toute la boutique à elle toute seule, comme elle venait de le lui expliquer, et Koralyne n'aurait fait que la gêner, à rester assise en plein milieu du magasin. De toutes manières, elle se sentait plus à l'aise à l'extérieur. Assise sur le banc, elle inspira à fond, appréciant le froid et l'humidité de l'air. Quelques flocons s'étaient mis à tomber, mais ils fondaient aussitôt qu'ils entraient en contact avec sa peau brûlante. En Angleterre, il neigeait aussi souvent l'hiver. Et la réserve où elle avait grandie se trouvait dans un coin un peu similaire à Hanover. Il y faisait souvent froid, et gris. Mais Koralyne, qui aimait plus que tout les orages, adorait ce genre de climat et elle ne se sentait pas vraiment dépaysée depuis qu'elle était arrivée. Fermant les yeux, elle laissa son esprit vagabonder, comme elle en avait l'habitude. Ses soeurs aimaient se moquer d'elle et de sa manie de rêvasser à tout bout de champ. Elle songea à la foret qui environnait la réserve, et qui sentait bon la mousse et la terre mouillée quasiment à n'importe quelle saison de l'année. Elle songea aux longues balades avec Pehaul.. et une voix masculine la ramena brutalement à la réalité. Elle ouvrit les yeux, et ses prunelles bleus se posèrent sur un garçon qui la fixait.

**Invité** Invité

Enzo était partit se promener dans les bois, il avait besoins de calme pour pouvoir réfléchir et se plonger dans ses pensées sans être dérangé par les autres membres du clan. Cela faisait quelques minutes que Enzo marchait et il décida de s'assoir sur l'un des rochers au bord de la falaise ce qui lui donnait un point de vue imprenable, ces moments de calme et de réflexion étaient devenus très rares ces derniers temps, le jeune Alpha enfin plus si jeune que ça, était toujours sollicité en ce moment que ce soit pour accueillir de nouveaux membres dans la meute ou pour rencontrer d'autres suceurs de sang qui semblaient d'ailleurs de plus en plus nombreux. Dernièrement la meute s'étaient agrandie avec l'arrivée de la meute de Jacob, Enzo avait vu cela d'un plutôt bon oeil ce qui n'était pas forcément le cas de tous les membres de la meute, heureusement Enzo avait comme toujours eut le dernier mot, il en fut de même pour ce qui était du traité de paix avec les Cullen, Enzo était en effet le seul a vouloir les accueillir ici il avait dû donner d'interminables explications a ses camarades sur les raisons de cette décision mais le fait était que c'était sa curiosité qui l'avait pousséà accepter les Cullen sur son territoire, en effet il voulait savoir si des vampires pouvaient vraiment se passer de sang humain...

Alors que Enzo était totalement plongé dans ses pensées il fut ramené à la réalité par son téléphone, le numéro qui s'affichait était celui de l'épicerie, cela ne pouvait être que Sora qui se demandait ou il était passé, Enzo espérait qu'elle n'avait pas besoins de lui et qu'il allait pouvoir rester ici mais au fond il se doutait bien qu'elle ne l'appelait pas pour le simple plaisir d'entendre sa voix alors qu'ils s'étaient vus le matin même...

Sora dit a Enzo qu'une jeune demoiselle avait besoins de le voir il pensa alors que cette mystérieuse inconnue devait être a l'origine de l'odeur qui était apparue dans les environs ces derniers temps et sa bien aimée le lui confirma. Enzo répondit à Sora qu'il arrivait tout de suite, il se dépêcherait et l'inconnue devait l'attendre à l'épicerie, Sora ajouta une dernière chose, elle voulait que Enzo trouve quelqu'un d'autre pour la ronde de ce soir car aquene était malade chose a laquelle il répondit:

"Ne t'en fais pas pour ça Sora j'assurerais la ronde moi même ce soir."

Enzo était un peu agacé à l'idée de devoir retourner à la réserve, une fois de plus on faisait appel a lui a croire que depuis qu'il était Alpha les gens ne savaient plus rien faire par eux même et ils avaient tous besoins de lui pour régler leurs petits problèmes cette situation pesait parfois sur les épaules de l'Alpha mais il était bien trop gentil pour dire aux gens ce qu'il pensait vraiment et pour les envoyer promener une bonne fois pour toute.

Pour aller plus vite Enzo se transforma en loup, la neige commençait à tomber et elle recouvrait maintenant le sol et était alors comme invisible, son pelage se confondait avec la neige seul ses empreintes dans cette poudre blanche le trahissaient. Il arriva à l'orée de la forêt et reprit alors une apparence normale, il ne portait que son jean et était torse nu alors qu'il neigeait n'importe qui aurait pu trouver cela étrange mais quand on a un corps à une telle température cela n'a absolument rien d'étrange... Enzo avança en direction de l'épicerie, il aperçut alors une jeune femme qu'il ne connaissait pas et qui était à l'origine de cette odeur qu'il ne reconnaissait pas. La jeune femme avait les yeux fermés, Enzo s'approcha doucement d'elle et se contenta de dire:

"Euh, excusez moi, c'est vous qui vouliez me voir?"

Koralyne eut un mouvement de recul instinctif. Non pas qu'Enzo présente un quelconque danger, mais il émanait de lui cette aura propre à un alpha. Elle savait que chaque loups, comme elle, était à même de ressentir cette sensation en présence de l'alpha de la meute, que ce soit sous forme humaine ou sous forme lupine. Ce sentiment de sécurité, mais également de puissance, d'autorité. Une aura de force et de pouvoir semblait émaner d'Enzo, mais Koralyne savait que c'était aussi son imagination fertile qui lui donnait cette impression. Enzo était un alpha, soit, mais ce n'était pas non plus aussi visible. Elle se demanda si les humains de la réserve arrivait à ressentir ce sentiment de supériorité de la part d'Enzo. Curieusement, le doux visage du jeune homme contrastait avec les sensations qu'elle éprouvait. Elle songea que Pehaul, lui aussi, avait un visage agréable et qui inspirait la confiance. Un éclair de douleur traversa ses prunelles, et elle frémit, baissant brusquement les yeux, s'abîmant, l'espace d'un instant, dans des souvenirs qui la rongeaient.
Lorsqu'elle se leva, après avoir inspiré profondément, elle hocha la tête, pour répondre à la question qu'Enzo venait de lui poser.

" C'est moi. " confirma-t-elle à voix basse. " Je m'appelle Koralyne McTyler. Je viens d'Angleterre. Je.."

Elle s'interrompit, se demandant soudain par quoi commencer. Que dire en premier? Face à Sora, face à une jeune femme qui menait la vie qu'elle aurait pu mener elle aussi, tout était sorti d'un coup, elle avait parlé sans réfléchir, étourdie par sa douleur, rongée par la culpabilité, meurtrie au plus profond de sa chair. Mais face à Enzo, maintenant qu'elle avait retrouvée son sang-froid, elle ne savait plus trop quoi dire. Elle voulait lui raconter ce qui s'était passé dans sa tribu, et ce qu'il était advenu de sa meute, elle avait besoin de raconter l'ensemble des événements tragiques qu'elle avait connu il y a peu. Et plus encore, elle avait besoin qu'on l'aide à éclaircir ce mystère, elle avait besoin de comprendre ce qui avait pu tuer ce vampire, poussant son clan à attaquer les loups. Elle décida alors de jouer franc-jeu.

" J'ai besoin d'aide. J'ai besoin qu'on me croit, et qu'on m'aide à rétablir la vérité. "

Elle se rassit, se préparant à raconter sa terrible histoire, se préparant à revivre à nouveau chaque détails de cette sordide nuit.

" J'ai fui mon pays. Je vivais dans une petite réserve, environné par une foret. Un peu comme ici. Un peu comme partout. Et comme ici aussi, il y avait une famille de vampires. Certains avaient les yeux dorés, et avaient conclu un pacte avec notre meute. Il y avait d'autres vampires, qui se sont peu à peu joint à cette famille, mais eux, ils avaient les yeux rouge sombre. Je ne m'en souviens pas bien, je ne les ai pas vraiment rencontrés, juste aperçus.. Ils venaient, pour la plupart, par curiosité, et ne restaient pas forcément. Au fur et à mesure, la meute s'est agrandis. "

Elle leva ses yeux d'un bleu perçant vers Enzo, ne lui laissant pas le temps de répondre.

" Toutes mes soeurs sont devenues des louves. Dans ma famille, seules les femmes le peuvent. Cela ne se produit pas systématiquement, mais comme il ne naît que des femmes.. Je suis la dernière à m'être transformée. Et quelques années après cela.. un vampire s'est fait tuer. Je ne savais même pas que cela était possible, je veux dire, autrement que par un loup ou par un autre vampire! Les autres vampires ont cru que nous avions rompu le pacte, alors ils se sont attaqués à la meute.. Nous avons tous.. Ils ont tous été décimés. Je suis la dernière. Et je veux qu'on me croit. Je veux prouver que les loups de ma meute, de ma famille, étaient innocent. Je ne savais pas où aller, mais ma mère m'a alors parlé de cette famille de vampires, aux yeux dorés, et de cette trêve, et j'ai pensé.. qu'ici, on pourrait m'aider à comprendre.. et à prouver que j'ai raison. Ce ne sont pas de loups qui ont tués ce buveur de sang! "

Submergée par l'émotion, un violent tremblement la secoua, et ses mains crispées sur le rebord du banc y laissèrent de profondes marques. Elle leva à nouveau des yeux humides vers Enzo, alors que le tremblement qui agitait son corps se dissipait.

" Aidez moi, je vous en prie. "

**Invité** Invité

Les choses à Hanover avaient tendance à se bousculer ces derniers temps. Enzo ne pouvait pas se voiler la face, certains éléments pouvaient facilement faire deviner que l’arrivée des Cullen en ville était à l’origine de bien des mouvements, soit parmi les buveurs de sang, soit parmi les Protecteurs. De plus en plus, il arrivait aux Winnipesaukee de ressentir une présence solitaire en ville, un loup qui se balade sans sa meute, et dont l’aura empiète sur leur terrain, tout en paraissant totalement perdue. Depuis plusieurs jours, ils avaient senti cette présence, frêle à côté de la leur, perdue sans aucun doute. Dans un sens, qu’elle appartienne à leur meute ou à une autre n’avait pas vraiment d’importance, les Protecteurs étaient tous liés par la même destinée, le même devoir, ils faisaient tous partie d’une même équipe, divisée en plusieurs escadrons, divisés à travers le monde, en de petits groupes éparses, prêts à mourir pour protéger l’humanité, un peu comme si c’était dans leurs gènes, et qu’ils ne pouvaient pas échapper à ce qu’ils devaient faire. De toute manière, quel loup pourrait devenir allié d’un vampire, franchement ? Toujours est-il qu’en sentant cette nouvelle présence à Hanover, les Winnipesaukee avaient commencé à s’inquiéter… la dernière fois qu’ils avaient accueilli un étranger – Jacob – les Cullen avaient débarqué en ville et ce, avec le consentement de l’Alpha… c’est dire comme certains de la meute commençaient à se méfier des nouveaux venus. Cependant, en arrivant à la hauteur de celle-ci, Enzo n’avait rien ressenti de ce qu’il avait ressenti chez Jacob. Elle n’avait pas la même assurance, comme si quelque chose avait été brisé en elle… et pas besoin d’être sous sa forme lupine pour le remarquer : rien que par sa façon de bouger, par son regard vide, elle avait quelque chose qui transpirait le mal-être et qui captait automatiquement l’attention.

Il était resté debout, tandis qu’elle s’était rassise, après quelques phrases qui avaient tout, sans le contexte de son histoire, pour être totalement incompréhensibles et énigmatiques. Il aurait pu croire qu’elle tournait autour du pot, parce qu’elle avait peur de quelque chose, de parler, ou des loups eux-mêmes qui sait… Non, si Sora l’avait appelé, c’était pour une bonne raison, sans ça, elle n’aurait jamais jugé nécessaire de le faire venir. Ecoutant en silence l’histoire de Koralyne, Enzo posa son regard sur le sol, dans une expression qui pouvait presque traduire toutes les réflexions que la jeune louve faisait naître en lui. Dans le fond, en retournant son histoire dans tous les sens, il ne savait pas ce qu’elle attendait de lui. Qu’il l’accepte parmi les Winnipesaukee ? Qu’il tolère sa présence elle ville ? Ou que les Winnipesaukee servent sa vengeance contre un ennemi fantôme dont elle-même ignorait jusqu’à l’identité ? Alors qu’elle achevait son récit par une ultime réplique, Enzo releva le regard du sol, pour croiser le sien, d’un bleu perçant et pourtant si triste tant il en disait long sur tout ce qui la traversait. Il n’imaginait même pas la torture que pouvait être celle de lire dans son esprit, sous sa forme animale et rien qu’à s’imaginer cette situation, il sentit un léger frisson lui traverser le dos. Tout Protecteur dans sa vie avait connu des coups durs, des chocs particuliers… des événements qui parfois, les avaient même menés à cet état là, cette vie mi animale, mi humaine. Restant silencieux quelques instants, il la détailla, soutenant surtout son regard dans lequel il captait tout autant que dans sa façon d’être… elle révélait tellement, comment avait-il pu ne pas la repérer plus vite ? Peut-être même qu’il l’avait déjà croisée à l’occasion il y a quelques temps de ça… et s’il s’était attardé quelques instants à l’observer, il aurait compris plus vite encore. Après avoir pris le temps de se plonger dans son regard pour trouver ses mots, il finit par se détourner, pour regarder ailleurs et prendre la parole, d’une voix neutre, qui ne cherchait pas à briser toutes ses espérances :

« Koralyne… considère-toi comme chez toi ici… Mais c’est tout ce que j’ai à t’offrir dans ce que tu demandes… T’accrocher à ton passé t’empêche d’aller de l’avant, ça se voit. Hanover est envahie de buveurs de sang, et je ne peux pas me permettre de lancer les miens à la recherche d’un ennemi que tu ne retrouveras peut-être jamais. »

Il se tut, lâchant le regard de la jeune femme alors qu’il s’attendait sans doute à lire bien des déceptions dans ses yeux. Pourtant, il savait très bien que c’était le meilleur choix à prendre, pour sa meute, qui avait déjà assez à faire des buveurs de sang et des histoires des Cullen pour se préoccuper en plus d’une meute décimée dont l’unique survivante cherchait vengeance. L’alpha garda le regard rivé sur la neige qui tapissait le sol et sur laquelle restaient quelques empruntes de passages plus ou moins récents. Doucement, il vint s’asseoir au côté de la louve, il voulait faire plus pour elle, et ces derniers temps plus que jamais, il savait que c’était possible, et que les circonstances le lui permettaient largement :

« Hanover est pleine de dangers de nos jours… Tu n’as sans doute pas choisi cette ville par hasard et les buveurs de sang en font un parfait refuge. Nous ne sommes pas assez nombreux pour les contrer, et les renforts ne sont jamais de trop. »

Il releva le regard dans sa direction, comme pour capter son attention, au cas où elle ne comprenne pas la proposition qu’il était en train de lui faire. Les nouveaux venus étaient rares, le lien qui s’était créé entre Jacob, ceux qui l’avaient suivi et les Winnipesaukee n’était que très rarement arrivé auparavant… cependant, quelque part, Enzo pouvait comprendre qu’elle avait besoin d’une raison de poursuivre son chemin sans sa meute… Il ne savait pas si lui proposer de s’allier aux Winnipesaukee – ou dans le meilleur des cas, les rejoindre – était la meilleure proposition à lui faire, après tout, peut-être que la perte de sa meute la poussait à vouloir être plus seule qu’autre chose… seulement, on dit bien qui ne tente rien n’a rien ? Captant le regard de la louve, il reprit, l’air de rien, la voix toujours autant apaisée, il ne cherchait pas à éveiller une quelconque animosité ou méfiance à son égard, encore moins à l’égard de la proposition qu’il lui faisait :

« Je sais qu’en perdant ta meute, tu as sans doute perdu plus de proches que tu n’as pu en avoir dans ta vie humaine… tu as comme perdu sans doute… l’intégralité de tes pensées, alors qu’il n’y avait plus qu’un profond silence dans ta tête. Et crois-moi… je comprends parfaitement que tu puisses avoir envie de te venger, de trouver un responsable pour ce qui est arrivé… et même d’innocenter les siens au regard de ceux qui les ont blâmé. » Pendant longtemps, il avait lui-même chercher le coupable, celui qui avait tué son père et cette quête lui avait souvent embrouillé l’esprit, au point de lui faire perdre le nord, quitte à le rendre fou des fois, alors qu’il avait l’impression que cette odeur revenait plus puissante que jamais, mais partout et nulle part à la fois… comme si elle était transportée par le vent selon les jours. Crispant la mâchoire, il reprit contenance, alors que son esprit se perdait dans des réflexions inutiles. « Tu… devrais passer à autre chose… quand on poursuit une ambition pareille, on se rend vite compte que la quête est veine… et elle l’est déjà sans doute pour toi, sinon tu ne demanderais pas mon aide. » Il se releva souplement, se repostant au même endroit qu’il avait occupé lorsqu’elle avait parlé, un peu comme si c’était un signe qui lui disait qu’il attendant une quelconque réponse de sa part : « Je ne cherche pas à te forcer la main, bien entendu… Comme pour conclure ses paroles, il lui adressa un regard plus chaleureux, qui était loin de l’homme statistique qu’il avait été quelques instants plus tôt, et qui pouvait presque paraître froid parfois… après tout, oublier, tourner la page, il était bien placé pour savoir que c’était plus facile à dire qu’à faire…

Spoiler:

Tout déballer une seconde fois n'était pas chose aisée, et il lui était encore plus difficile de ne pas se laisser aller à éprouver une fois de plus sa douleur, qui l'avait quelques instants auparavant faite pleurer comme une madeleine devant une parfaite inconnue. Hors de question de s'humilier encore de cette façon! Elle était une louve, elle devait tenir bon le temps de pouvoir ensuite retourner dans sa chambre d'hôtel et se réfugier dans les larmes. En attendant, elle avait enfin l'occasion de parler à l'Alpha de la meute des Winnipesaukee, elle n'allait pas laisser passer sa chance.
Sa chance de quoi? Apparemment, Enzo avait mal compris ses intentions. En même temps, elle ne s'était pas vraiment expliqué sur ce qui l'avait poussé à venir à Hanover. Il était normal qu'il se méprenne sur ses intentions, et elle se morigéna intérieurement, se reprochant de ne pas avoir été plus claire. Enzo avait l'air de soigneusement choisir ses mots, comme s'il craignait de l'offenser, ou de lui faire du mal. En fait non, constata-t-elle après l'avoir observé, il craignait de la décevoir. Et comme il le lui expliqua, il ne pourrait pas l'aider à se venger, alors que c'était loin d'être le désir de Koralyne. Elle haussa légèrement les sourcils, mais tourné comme il l'était, Enzo ne pouvait le voir. Il se trompait. Lourdement même. Le coeur de Koralyne n'était pas empli d'un désir de vengeance. Elle n'avait pas songé une seule fois à se venger, à venger la mort des siens, pas une seule seconde. En même temps, il était normal qu'il pense que c'était ce qu'elle souhaitait, il suffisait de connaître la mentalité d'un loup pour se douter qu'un tel crime, aux yeux d'une meute, ne pouvait rester impunie. Mais Koralyne n'avait pas de meute. Elle n'en avait plus. Peut-être que, effectivement, s'il n'y avait eu qu'un incident mineur, peut-être que si les vampires avaient rompus la trêve, alors oui, en effet, la meute se serait vengée. Mais Koralyne ne voulait pas, ne pouvait pas, se venger, de quelques manières que ce soit. De plus, elle n'était pas le genre de fille à entraîner d'autres personnes dans quoi que ce soit de dangereux.
Les Winnipesaukee et les vampires d'Hanover semblaient avoir trouvés une certaine paix, et c'était une très bonne chose, en fin de compte. Cela se passait, à peu de choses près, comme dans son ancienne chez elle. Lorsqu'Enzo se tut, Koralyne jugea qu'il était temps d'éclaircir les choses.

" Je ne veux pas me venger. Je ne suis pas venue ici pour cela. Ça ne m'a même jamais effleuré l'esprit. " révéla-t-elle doucement. " Me venger ne me rendra pas ceux que j'ai perdu. Me venger ne m'empêchera pas d'être seule avec mes pensées." ajouta-t-elle en faisant allusion au partage des pensées entre loups d'une même meute. "Il est vrai que j'aimerais trouver celui, ou celle, ou la chose qui a causé toutes ces atrocités, mais pas pour me venger. Plutôt pour prouver l'innocence de ma meute. C'est tout ce qui m'importe, que la vérité soit rétablie. "

Elle étira ses longues jambes, un instant distraite de sa douleur, et leva ses yeux rougis vers le ciel blanc. Il allait probablement encore neiger, et l'air était piquant. En inspirant profondément, Koralyne mémorisa sans s'en rendre compte l'odeur d'Enzo. Elle avait senti le même parfum sur Sora, et dans l'épicerie également, comme un peu partout dans les alentours. Elle se demanda ce que la meute des Winnipesaukee avait bien pu penser de son arrivée ici. Avaient-ils cru qu'elle amenait les problèmes? S'étaient-ils sentis menacés? Koralyne n'avait jamais entendu parler de loups solitaires, mais cela devait quand même exister. En songeant qu'elle prenait ce statut, elle ferma les yeux un instant. Quelle horreur..

" Les vampires et les loups de ma meute avaient conclus une trêve. Il n'y avait que trois ou quatre vampires, si ma mémoire est bonne, et ils ne se nourrissaient pas de sang humain. Leurs yeux avaient une couleur que je voyais pour la première fois, une couleur dorée très agréable à regarder. Ils ne savaient pas que les loups existaient, et voulaient juste s'établir dans une ville, et vivre aussi normalement que possible. Je ne sais pas grand chose de cette époque, cela s'est passée bien avant ma naissance. Ensuite, d'autres vampires sont arrivés. Il y en avait qui tuaient des humains, ceux-là ont tous été chassés, et puis parfois il y en avait qui étaient bons, et plus humains qu'un homme ne pourrait l'être. " dit-elle d'un ton presque affectueux.

A ces mots elle releva la tête.

" J'aime bien les vampires qui ne tuent pas les humains. Bien sûr, ils tuent des animaux, et se nourrissent de leur sang, mais moi, je ne les considère pas comme dangereux. Je sais que ça ne fait pas de moi une louve très maligne. Mais je n'ai jamais demandé à être une louve, après tout, et en tant qu'humaine, j'aurais pu côtoyer ces vampires sans même m'en rendre compte, et ils ne m'auraient pas fait de mal. Alors je les aime bien. " dit-elle simplement avant de reprendre son récit : "Plus les vampires s'installaient, plus la meute s'agrandissait. Et puis un soir, nous avons reçu un appel de détresse d'une de mes soeurs : un vampire venait d'être tué, mais on ne savait pas exactement comment. Je sais qu'un vampire peut en tuer un autre, je sais qu'un loup peut tuer un vampire, mais là, aucun loup n'avait fait quoi que ce soit. J'étais sous ma forme de louve, à ce moment-là, et j'ai pu lire dans les pensées de chaque membres de la meute : personne n'a touché à un cheveux des vampires. Je sais que vous pouvez me croire quand je vous dis ça. Il est impossible de cacher quoi que ce soit à sa meute. " affirma-t-elle. " Si ce n'était pas un loup, cela aurait pu être un vampire, mais dans ce cas là aussi, nous l'aurions senti. Or, le vampire qui est mort avait été tué par autre chose. Pas par les crocs d'un loup, pas par la force d'un vampire, par autre chose. "

Sure et certaine de ce qu'elle avançait, elle leva un regard flamboyant vers Enzo.

" Vous comprenez? Je ne veux pas me venger. Je suis venue ici parce que je sais qu'il y a des vampires ici aussi. Je veux les rencontrer, leur raconter mon histoire, et s'ils me croient, je veux qu'ils fassent passer le message : ma meute est innocente! Je ne veux rien d'autre, pas de vengeance, pas d'actes stupides, mais qu'on rétablisse la vérité sur cette affaire. Après alors.. "

Elle s'interrompit. Elle ne savait pas du tout ce qu'elle allait faire après.

" Après, je ne sais pas. Je ne sais pas ce que je ferais. Que font les loups sans meute, d'habitude.. " lança-t-elle avec douleur en laissant son regard dériver au loin.

Enzo se tourna vers Koralyne et plongea son regard dans le sien. Il venait de lui proposer son aide et ne retirerait pas ses mots, toutefois il devait s'assurer que sa présence ne serait pas source de problèmes. Après tout, il ne la connaissait absolument pas et ne savait rien non plus de ses intentions en venant ici. Kora étant étrangère aux Winnipesaukee, il ne pouvait pas lire dans ses pensées non plus et discuter avec elle était le seul moyen qu'il possédait pour obtenir des réponses à ses questions. La jeune louve venait de lui raconter un morceau de son histoire, et Enzo avait désormais peur qu'elle soit à Hanover pour se venger. Il ne voulait pas d'une trouble-fête dans sa ville, surtout pas alors que les Winnipesaukee étaient déjà déchirés par leurs propres différends dus à la présence des Cullen. L'Alpha avait un fardeau bien assez lourd sur les épaules et il était hors de question que cette nouvelle venue en rajoute. Il souhaitait être présent à ses côtés pour l'aider à reprendre une existence aussi normale que possible. Mais pour cela, Koralyne devrait prouver qu'elle n'avait aucune arrière-pensée, aucun plan vengeur à exécuter. Dans le cas contraire, il n'hésiterait pas à la mettre dehors pour protéger les siens. Certes elle avait vécu des événéments tragiques et difficilement surmontables, toutefois cela ne lui donnait pas le droit de mettre les Winnipesaukee en danger, de quelque manière que ce soit. Enzo était un véritable ange gardien et protégerait tout le monde s'il le pouvait. Il n'en restait pas moins que sa meute passait en premier. Toujours.

Mais avant de condamner Koralyne, le jeune homme attendit de plus amples explications, et fut rassuré par les mots qu'elle prononça ensuite. Elle assura qu'aucun souhait de vengeance ne la taraudait, qu'elle n'était pas venu ici pour cela mais pour rencontrer les Cullen et faire passer un message. Elle voulait que sa meute soit lavée de toute accusation de meurtre. Enzo ne la quitta pas des yeux alors qu'elle allait plus en profondeur dans son histoire, essayant de voir si elle disait la vérité sur ses intentions. Il avait toujours eu un don pour lire les gens, c'était d'ailleurs comme ça qu'il avait fini par se rapprocher de Sora. Bien sûr, les loups-garous d'une même meute avaient du mal à dissimuler leurs pensées lorsqu'ils se trouvaient sous forme animale, mais certains, avec de l'expérience, y arrivaient. Sora en faisait partie ; pour autant, Enzo avait su lire entre les lignes et s'était rapproché d'elle de cette manière. Aujourd'hui, ils sortaient ensemble, et l'Alpha était heureux d'avoir trouvé une compagne comme Sora Kimama. Il la comprenait comme personne d'autre ne pouvait la comprendre, la connaissant par coeur, n'ayant besoin que d'un seul regard pour savoir tout ce qui lui passait par la tête.

Ainsi, il étudia Koralyne, l'écoutant avec la plus grande des attentions. Elle évoqua les vampires végétariens, avouant qu'elle les aimait bien car ils ne faisaient aucun mal aux humains. Certes ils tuaient des animaux, mais les lycans seraient bien mal placés pour leur reprocher cela ; surtout Enzo, qui passait tout son temps libre à chasser les écureuils, son « plat » favori. Au moins, Koralyne n'avait pas dans l'idée de s'en prendre aux Cullen. Au contraire, elle voulait les voir, leur raconter la tragédie qui l'avait touchée en Angleterre. Elle voulait aussi comprendre, découvrir la vérité : qui avait bien pu tuer ce vampire dont la mort avait tout déclenché ? Enzo ne connaissait pas son identité, mais il savait que cette personne était un chasseur. Ils étaient les seuls à pouvoir envoyer un buveur de sang en Enfer, mis à part les loups-garous. Afin d'apaiser Kora, Enzo aurait aimé pouvoir le lui dire, mais il n'avait pas encore assez confiance pour lui révéler une telle chose. Il devait en parler à Zack Hamilton avant ; peut-être était-il au courant de quelque chose ?

« Je comprends, oui. » finit par dire Enzo après quelques instants de réflexion. « Je parlerais au chef des Cullen, pour voir s'il accepte de te rencontrer et de t'écouter. C'est le mieux que je puisse faire pour le moment. »

Elle avait l'air d'être sérieuse, quand elle disait ne pas vouloir se venger de qui que ce soit. Koralyne apparaissait à Enzo comme une jeune louve - bien qu'il ne connaisse pas son âge en réalité - fragile suite à la perte de sa famille. Et qui ne souhaitait rien d'autre que de retrouver un semblant de joie de vivre, une nouvelle maison, une nouvelle famille. Son regard dévia pour se poser au loin, et d'une voix pleine de douleur, elle se demanda à voix haute ce que faisaient les loups sans meute, d'habitude. Enzo se rapprocha d'elle et lui posa une main sur l'épaule. Il esquissa un petit sourire et entreprit de répondre à sa question, sur un ton qui se voulait plein d'espoir.

« Et bien, soit ils restent seuls et errent... Soit ils trouvent une meute acceptent d'en faire partie. Serais-tu d'accord pour rester avec nous ? Je ne sais pas où tu loges mais ce serait bien que tu puisses te rapprocher, non ? J'ai une chambre d'ami à te proposer, mais si tu préfères, je peux demander à une autre louve de t'accueillir. Passe simplement cette journée à te reposer, et dès demain je te présenterai aux autres et t'expliquerai tout ce qu'il y a à savoir sur les Winnipesaukee. Ca te va ? » Il serra un peu plus sa main sur son épaule, et d'un ton un brin plus sérieux tout autant que confiant, il ajouta : « Et ne t'inquiète pas, tu ne resteras pas seule avec tes pensées bien longtemps. Après tout, ce que l'on croyait impossible s'est tout de même passé : ma meute et les Quileute ont fusionné pour ne faire plus qu'un. Il n'y a aucune raison pour que les choses se passent différemment en ce qui te concerne. »

Il voulait la réconforter, sans lui mentir pour autant - il ne mentait jamais. Et il espérait avoir réussi. Quand il repensait à Jacob Black, devenu son Bêta alors qu'il ne faisait pas partie de la même meute, il se disait que Koralyne avait ses chances aussi. Si elle s'impliquait vraiment, si dans sa tête elle souhaitait réellement devenir une Winnipesaukee, alors la Nature ferait le reste. Un beau jour, elle réaliserait qu'elle pouvait entendre les pensées de cette famille d'accueil et inversement. Et ce jour serait une véritable victoire pour Enzo, qui se jura en cet instant précis de devenir un véritable ange gardien pour la demoiselle. Non seulement parce que c'était son rôle d'Alpha, mais surtout parce qu'elle semblait le mériter. Elle venait de vivre un enfer, et pourtant, aucune rage ne l'habitait. Elle réclamait seulement le droit à une seconde chance. Et elle l'aurait. Parole d'Enzo Greenwood.

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